

Autographié à Genève par l'Auteur.
Monsieur Pencil.
1840
Ci-derrière commencent les Aventures de Monsieur
et de Madame Jolibois, simples particuliers,
combinées avec les faits et gestes du
Docteur, et les choses merveilleuses relatives au
Bourgeois et à Mr. Pencil. Le tout mêlé aux
drôleries du temps présent, et comme quoi
George Luçon échappa sauf au Vingtième-léger
qui avait bu un coup de trop chez le maire.
Va petit livre, et choisis ton monde, car
aux choses folles, qui ne rit pas, baille; qui ne
se livre pas résiste; qui raisonne se méprend
et qui veut rester grave, en est maître.
Lithographie de Schmid.

Mr. Pencil, qui est artiste, dessine la
belle nature.
|
Mr. Pencil, qui est artiste, regarde avec complaisance ce
qu'il a fait, et remarque qu'il en est content.
|
Mr. Pencil, qui est artiste, remarque
qu'à rebours il est content aussi.
|
Et même en regardant par
dessus l'épaule.
|

Ayant essayé de ne regarder que le revers,
Mr. Pencil, qui est artiste, remarque avec
plaisir qu'il est encore content.
|
Pendant que Mr. Pencil remarque avec plaisir qu'il est content
un petit zéphir s'amuse à lui enlever sa casquette.
|
En ayant assez de la casquette, le petit zéphir rebrousse pour
s'amuser avec le dessin.
|

Cependant un bourgeois qui aperçoit le chef-d'oeuvre
se met à sa poursuite.
|
Cependant le Docteur remarquant un vent qui
s'élève, s'empresse d'observer ses instruments afin
de remonter ensuite aux causes.
|
Cependant Mr. et Madame Jolibois voyant que le vent est favorable,
se décident à faire leur partie de bateau projetée depuis longtemps.
|

En ayant assez du dessin, le petit zéphir passe au
Bourgeois, et s'amuse à ouvrir son parapluie!
|
Puis il souffle d'en bas, ferme.
|
Ayant senti du froid, le Docteur se
rhabille, et s'en va rédiger sa
découverte d'un vent souterrain tout
nouveau.
|
Par suite du vent souterrain, Mr. et Madame
Jolibois commencent à être dans un sérieux
embarras
|

qui va croissant.
|
Le petit zéphir s'amuse à pousser le bourgeois
dans les bras de Mde. Jolibois. Mr. Jolibois,
(car hélas la passion aveugle) ressent les
tourments d'une atroce jalousie.
|
Et il se noierait s'il n'y
avait pas trop de fond
dans cet endroit.
|
Cependant le docteur ayant cru remarquer
que son vent souterrain est chargé de
particules odorantes, s'occupe d'en remplir
des phioles à l'appui du grand mémoire
qu'il prépare.
|

Mr. Pencil ne retrouvant plus que le portefeuille est enchanté que
son dessin ait été enlevé par quelqu'amateur du vrai beau.
|
Ayant refait un autre dessin, Mr. Pencil s'embusque pour
découvrir l'amateur.
|
Cependant le docteur ayant mis
les faits en bouteille, s'occupe de
la rédaction de son grand mémoire
sur un vent souterrain tout nouveau.
|

Le bourgeois ayant imprudemment
lâché le parapluie, a le bonheur de
tomber sur les épaules de Mde. Jolibois.
|
Ce que voyant, (car hélas la passion aveugle) Mr
Jolibois se persuade que c'est sa femme qui
enlève son amant. Aussitôt il se dépouille de ses
vêtements pour chercher la mort dans les flots,
mais il trouve que la chose est malaisée.
|
Porté par le zéphir à hauteur convenable, Mr.
Jolibois (car hélas la passion aveugle) s'efforce
de rompre ces criminels liens, mais il manque de
point d'appui.
|
Après quoi le petit zéphir s'amuse
à faire tourbillonner le tout.
|

Cependant le Docteur est averti par sa servante qu'on voit,
depuis le jardin, comme une lune.
|
Du premier coup le Docteur découvre que c'est une
planète toute nouvelle, à laquelle il donne le nom
de Psyché.
|
A peine le Docteur s'est-il
mis à rédiger l'observation
que sa servante lui crie
d'accourir bien vite.
|

C'est le soulier de Made. Jolibois et le parapluie du bourgeois qui
viennent de tomber du haut des airs.... Le Docteur s'écrie: Habitée!!
habitée!!!! (la planète).
|
Assailli tout à coup par une trop grande
quantité d'inductions et d'hypothèses, le
Docteur défaille dans les bras de sa servante.
|
A peine revenu à lui, le Docteur reprend la
plume pour décrire précipitamment les habitants
de sa planète, leurs moeurs probables, leurs
usages possibles, et leur civilisation virtuelle
etc. etc. etc. etc. etc. etc. etc......
|

A peine le Docteur s'est-il mis à rédiger la
description qu'il entend sa servante crier qu'à
présent on voit comme deux lunes.
|
Le Docteur accourt en s'écriant:
Satellite!!.... Satellite!!!!!!!
|
Mais ne pouvant se dissimuler que le satellite gravite directement sur son
jardin, le Docteur qui prévoit un choc de planètes, entre dans une terreur
inexprimable. La servante rit grâce à sa profonde ignorance qui lui
voile les causes et les conséquences.
|

Le Docteur sent déjà une chaleur insolite, et une extrême
raréfaction de l'air. La servante ne sent rien grâce à sa
profonde ignorance qui lui voile les effets.
|
Le docteur entend aussi un bruit sourd de rotation ellipsoïde et
parabolique. Sa servante n'entend rien, grâce à sa profonde ignorance
qui lui voile les rotations.
|

Le Docteur subodore aussi des exhalaisons sulfureuse. Sa servante ne
subodore rien, grâce à sa profonde ignorance qui lui bouche le nez.
|
Eclairé par la science, le Docteur
prévoyant la fin du monde, va
faire son testament, se met au
lit, et attend le choc d'un moment
à l'autre.
|
Sa servante qui ne prévoit rien grâce à
sa profonde ignorance s'en va cueillir des
salades pour le dîner.
|

Cependant Mr. Jolibois, sa chemise s'étant
entortillée, est détaché du tourbillon, et
vient tomber dans les salades.
|
A peine le Docteur s'est mis à
attendre le choc, qu'il entend sa
servante crier: Tiens! quel oiseau!
|
Pendant que le Docteur s'habille pour
accourir, la servante retourne du pied Mr.
Jolibois qui lui paraît un homme comme
un autre.
|
Profonde admiration du Docteur qui découvre du premier
coup que c'est un habitant de sa planète.
|

La première chose que fait le Docteur, c'est de mettre son habitant
sous clé dans la grande volière.
|
Cependant le Bourgeois ayant lâché
Madame Jolibois se détache
du tourbillon et s'en vient tomber
sur une meule de foin.
|
Son chien ayant voulu suivre
son maître, s'en vient tomber
sur le télégraphe.
|
Cependant le Docteur
se hâte d'achever son
grand mémoire sur un
vent souterrain tout
nouveau et de l'adresser
à l'Académie Royale,
afin de pouvoir s'occuper
sans distraction de
son habitant.
|

Après avoir terminé et expédié son mémoire, le Docteur voulant
commencer par les caractères internes se dispose à pratiquer
l'incision cruciale sur son habitant.
|
A peine Mr. Jolibois a-t-il senti la pointe du scalpel
que, revenu de son étourdissement, d'une seule crispation
cruciale, il met le Docteur hors de combat. (Car
hélas, la passion aveugle.)
|
Le Docteur rédige aussitôt:
.... léthargiques...
impérieux aussi.....
ils ruent avec une adresse
remarquable.
|

Mr. Jolibois persuadé (car hélas la
passion aveugle,) que c'est Mde.
Jolibois et son vil séducteur qui
l'on fait encager, se livre à des
jalousies sans bornes.
|
Le Docteur rédige:
... grands jureurs...
..................
..... climat brûlant.....
|
Et sur la tête aussi.
|
Le Docteur rédige:
.... marchent
indifféremment sur
les pieds ou sur la
tête.
|
Et en façon natatoire.
|
Le Docteur rédige:
..... ils sautent
comme des carpes.
|
Et en tourbillonnant.
|
Le Docteur rédige:
.... ils tourbillonnent
comme des démons.
|

En ayant assez des bourgeois et des bourgeoises,
le petit zéphir rebrousse pour chercher le dessin,
en sorte que Madame Jolibois commence à
redescendre.
|
Ce que voyant, Mr. Jolibois, (car
hélas, la passion aveugle) il
ramasse le scalpel laissé dans
la volière, et il s'en sert pour
couper un des barreaux.
|
Et sans attendre que son épouse ait pris terre, il l'accueille
(car hélas la passion aveugle,) à coup de barreau de cage.
|

Madame Jolibois ayant crié: Au secours!!.... le Docteur quitte la rédaction
pour l'observation. Il examine l'effet produit par la vue d'une dame de notre
globe sur un habitant de Psyché; et il note dans son esprit les plus petites
circonstances.
|
Le Docteur rédige.
|
La Science étant satisfaite, le Docteur juge bon d'aller
délivrer Mde. Jolibois; mais Mr. Jolibois juge mauvais
qu'on se mêle de ses affaires, (car hélas la passion aveugle)
et il tourne sa fureur contre le Docteur. Made. Jolibois
profite du quart d'heure pour s'enfuir.
|

Le Docteur poursuivi jusque dans son cabinet est secouru
par sa servante qui trouve moyen d'y enfermer Monsieur
Jolibois.
|
Après quoi le Docteur rédige la chose le moins
péniblement qu'il le peut:
... ils assènent des horions formidables.
|
Madame Jolibois qui se croit poursuivie se cache dans
la meule où est tombé le bourgeois. Mr. Jolibois qui
assiste à ce spectacle, de la fenêtre du cabinet, se
persuade (car hélas, la passion aveugle) que c'est
un rendez-vous.
|

Cependant le petit zéphir rencontrant le nouveau dessin de
Mr. Pencil s'amuse à le faire voltiger.
|
Mr. Pencil ne voulant pas céder son dessin, se
trouve avoir affaire au petit zéphir.
|
Mr. Pencil essaie de se retenir au chapeau
d'un particulier.
|

Mr. Pencil ayant eu du
dessous est enlevé à une
hauteur prodigieuse.
|
Heureusement que, laissé par le
zéphir, il vient tomber sur la
meule.
|
Voyant cela, (car hélas la passion aveugle)
Mr. Jolibois croit que c'est encore un
séducteur, et il prend mal de jalousie
rentrée.
|
Le Docteur se hâte de profiter de cette léthargie pour lier
son Psychiote, et le suspendre dans son cabinet d'animaux.
|

Revenu à lui, Mr. Jolibois, (car, hélas, la passion aveugle)
se persuade que les deux vils séducteurs, de concert avec
son épouse, l'ont livré aux bêtes, et ses cheveux se dressent
sur sa tête.
|
L'Académie Royale écoute la lecture du Mémoire sur le vent souterrain
tout nouveau, et nomme une commission de trois membres pour analyser
le contenu de ses phioles.
|

La commission procède à l'analyse du contenu.
|
Le gaz s'étant dégagé, il s'ensuit des soupçons atroces.
|
Et des explications très vives.
|

Les phioles s'étant cassées au milieu du désordre, les trois savants
tombent asphyxiés.
|
Cependant le chien du
bourgeois en cherchant
à se tirer d'affaire
fait légèrement basculer
le télégraphe.
|
Aussitôt toutes les lignes télégraphiques basculent
légèrement.
|

Aussitôt tous les télégraphes étrangers basculent à l'envi.
|
Aussitôt des courriers sont expédiés du Ministère des affaires étrangères.
|
Aussitôt les journaux sont palpitants d'intérêt!
|

Les politiques prévoient une
rupture funeste entre les
cinq puissance.
|
Le trois pour cent est lourd.
|
Les sucres fléchissent.
|
Les cafés languissent.
|
Les ateliers se ferment
et il se forme des
attroupements d'ouvriers.
|
Le ministre annonce à la
Chambre que trois cent
mille hommes menacent
la frontière.
|

L'on fait une levée en masse, et l'on mobilise les gardes nationales.

Et on les forme aux grandes manoeuvres.
|
Et l'on fait la remonte des chevaux.
|

Cependant les ouvrier continuant à demander
du pain par attroupements, Mr. Mondor monte
sur un tonneau:
"Mes bons amis, tout tient à la rente. En
ce moment la rente monte; ne bougez pas
et alors elle montera plus haut encore, et
alors les capitalistes voudront faire valoir
leurs fonds, et alors vous aurez du pain!"
|
Malgré cela les ouvriers continuant
d'avoir faim, Mr. de Pibrac monte sur
le tonneau:
"Mes bons amis, si vous avez
faim, prenez-vous en à votre
gouvernement. Avait-on faim
avant quatre-vingt neuf? Non.
Avait-on faim sous la restauration?
Non. Avons-nous faim nous qui
sommes restés fidèles? Pas le
moins du monde!"
|
Malgré cela les ouvriers
continuant d'avoir faim
Mr. Grelot monte sur le
tonneau:
"Mes bons, mes excellents
amis, je pleure sur vous.
Mais pour guérir vos maux,
il faudrait l'occupation
de la Belgique, l'épuration
des Préfets, la chute du
trône et la guerre générale!!..."
|
Malgré cela, les ouvrier
continuant d'avoir faim,
Mr. Truffet monte sur
le tonneau:
"Braves gens, retirez-vous
tranquillement, car les
attroupements peuvent
nous conduire à l'anarchie,
qui nous conduirait au
despotisme militaire, qui
nous conduirait à une
troisième restauration!..."
|
Malgré cela les ouvriers continuant
d'avoir faim, Mr. Raffle, St. Simonien,
monte sur le tonneau:
"Mes fils et mes filles!
Tout est amour. Sa transmission
par héritage est le dernier
anneau de la chaîne des privilèges.
Mes pères et mes mères!
Beaux-Arts, Sciences, Industrie.
A chacun selon sa capacité, à
chaque capacité selon ses oeuvres.
Le passé est fini. L'avenir commence.
Encore mille ans et tout ira bien!"
|

La garde nationale dissipe l'attroupement par la
persuasion.
|
Cependant le Docteur ayant achevé son mémoire, emballe
son Psychiote et son mémoire, qu'il adresse à l'Académie
Royale.
|
Ce qui est cause que Mr. Jolibois (car hélas
la passion aveugle) voyage franc de
port sur l'impériale de la malle-poste.
|

La malle-poste est attaquée pas les brigands et la plus
grosse caisse échoit au chef de la bande, qui se hâte
de l'emporter dans les bois.
|
Mais la grosse caisse étant venue à éternuer
le chef des brigands tombe à la renverse de
frayeur, et s'enfuit au plus vite.
|
Revenu à lui, Mr. Jolibois se persuade,
(car, hélas, la passion aveugle) que son
épouse et les deux vils séducteurs l'ont
fait enterrer tout vivant.
|
Cependant la remonte des chevaux
nécessite de grands achats de
fourrages.
|

Les fourrages ayant été achetés sont livrés au Vingtième-léger,
.
|
qui les livre à ses chevaux
|

Après qu'ils se sont familiarisé avec la situation, Mde. Jolibois et ses
deux cavaliers se servent des chevaux pour fuir, pendant que le
Vingtième-léger joue aux quilles.

S'étant aperçu de quelque chose, le Vingtième-léger se
met à la poursuite des voleurs.
|
En poursuivant les voleurs le Vingtième-léger gâte beaucoup de blé.
|

Pour plus de vitesse, le Vingtième-léger s'aide des chariots et des
montures des paysans.

Le Vingtième-léger ouvre les écluses pour inonder les lieux bas
à cause des voleurs.
|
Le vingtième léger brûle un bois pour incendier
les lieux hauts, à cause des voleurs.
|
Après quoi, le vingtième léger ayant
chaud se fait rafraîchir par le maire.
|

Les trois fugitifs étant arrivés près du bois s'y enfoncent en abandonnant
les chevaux sur la grande route.
|
En revenant de la messe, George Luçon trouve trois chevaux
abandonnés et, croyant bien faire, il les ramène au village.
|

Comme il passe devant le jardin du maire, George Luçon se voit arrêté
par le Vingtième-léger et traîné devant le conseil de guerre.
|
Ouïs les témoins, et le flagrant délit constaté,
George Luçon est condamné à être fusillé.
|

Le Vingtième-léger ayant bu un coup de trop chez le maire, manque
George Luçon et pique le Capitaine Ricard qui a commandé le feu.
|
George Luçon n'attend pour ressusciter que de voir le
Vingtième-léger un peu plus loin.
|

Après que le Vingtième-léger s'est éloigné, George Luçon revêt les habits du
Capitaine Ricard, l'habille des siens, et gagne les champs. Ce qui est cause
que le Capitaine Ricard est enterré sans les honneurs militaires.
|
Cependant Mr. Jolibois (car, hélas, la
passion aveugle) est inquiété par les rats
qui ont agrandi les trous de la caisse.
|
Cependant les trois fugitifs qui sont harassés de
fatigue ont le malheur de s'asseoir sur une
fourmilière.
|

Ce qui triple leurs démangeaisons.
|
Heureusement qu'ayant trouvé la caisse, ils vont s'y asseoir à l'abri des
fourmis.
|

A peine Mr. Jolibois a-t-il reconnu la voix de son épouse, (car hélas la
passion aveugle) que, poussant une apostrophe immense et désordonnée, il
cherche à se ressaisir de l'infidèle.
|
Croyant entendre le Vingtième-léger, George Luçon tire sur la gauche.
|

Revenus de leur frayeur, Mr. Pencil et le Bourgeois cherchent à délivrer
Madame Jolibois.
|
Entendant un bruit de caisson,
George Luçon tire sur la droite.
|
Les pans de la veste de Mr. Pencil ayant cédé, le Bourgeois
roule jusqu'à la grande route où il prend place sans la
diligence.
|

Entendant rouler, George
Luçon tire sur la gauche.
|
Mr. Pencil ayant eu une idée, délivre Mde.
Jolibois au moyen d'une paire de ciseaux.
|
Mr. Jolibois, (car hélas la passion aveugle)
essaie de poursuivre l'infidèle.
|
George Luçon croyant voir l'ombre du cercueil du Capitaine
Ricard, fuit épouvanté.
|

N'ayant pu atteindre sa femme,
Mr. Jolibois accuse le ciel
et les hommes.
|
Après quoi il se livre aux bonds d'une
jalousie effrénée.
|
Après quoi il s'abandonne au suicide
par pendaison.
|
Et il change de main.
|

Après quoi il essaie des charmes d'une
mélancolie contemplative.
|
Cependant George Luçon ayant tiré trop sur la gauche, tombe au milieu
du Vingtième-léger qui est à la recherche du Capitaine Ricard.
|

Se voyant reconnu à l'habit pour le Capitaine Ricard, George Luçon commande
la manoeuvre au bord du lac Batracien et crie: A droite, alignement!!...
|
Puis: Pas accéléré, en avant,.... marche!!..... et tout le
Vingtième-léger tombe dans l'eau.
|

Cependant la diligence passant au pied du Télégraphe, le
bourgeois croit reconnaître son chien perché sur l'instrument
et il prie le conducteur la faire arrêter.
|
Après quoi, le bourgeois étant monté sur l'impériale,
il a le bonheur d'attraper le chien par la patte.
|
Malheureusement le chien se met à
hurler, et les chevaux s'emportent.
|

Aussi, toutes les lignes télégraphiques jouent à l'envi.
|
Et les courriers se croisent.
|

Et le Ministre de la guerre imprime une immense activité à ses bureaux.

Et les journaux redeviennent palpitants d'intérêt.
|
Et l'on chante la Marseillaise.
|
Et l'on chante Henri quatre.
|

Ce qui amène des discordances,
|
des gendarmes,
|
et des plaies et bosses.
|

Les uns veulent le couplet sur la Pologne,
les autres ne le veulent pas.
|
Ce qui amène la manifestation de l'esprit public.
|
Cependant la mélancolie contemplative
ne lui faisant aucun bien, Mr. Jolibois
(car hélas la passion aveugle) erre à la
rencontre d'un mortel sensible et compatissant.
|
D'où le bruit se répand que c'est
la Bête du Gévaudan qui dévaste
la contrée.
|

Le maire se met à la tête d'une battue, et l'on aperçoit la bête qui
grimpe sur un noyer de cinq ans.
|
Voyant tant de mortels sensibles et un maire compatissant (car hélas la
passion aveugle) la Bête accourt à grands pas, et toute la battue
s'enfuit à grands pas aussi.
|

Cependant les gardiens du Télégraphe, s'étant
aperçus de quelque chose, secouent ferme,
pour nettoyer l'instrument.
|
Et toutes les lignes télégraphiques secouent aussitôt.
|
Le ministre étant averti que le Télégraphe est dans
un état de crise, se rend lui-même sur les hauteurs
et s'assure que c'est le Choléra qui s'avance sur
la capitale.
|

Aussitôt Mr. Mondor joue à la baisse.
|
Mr. de Pibrac accuse l'usurpation.
|
Mr. Grelot interpelle chaleureusement le ministre.
|
Mr. Truffet se purge.
|

La famille Truffet se fumige.
|
La commission sanitaire se transporte
dans tous les quartiers.
|
Et elle découvre dans une chambre haute
les trois savants asphyxiés.
|

La médecine ayant analysé les trois savants déclare
qu'effectivement ils sont morts du Choléra.
|
Les Pharmaciens s'en frottent les mains.
|
Et les employés aux pompes funèbres prévoyant une belle
saison d'affaires boivent à crédit.
|

Cependant le Docteur ne recevant point de
nouvelles ni de son mémoire, ni de son Psychiote,
tombe dans un grand abattement.
|
A la fin, sur le conseil de sa servante, il se détermine
à en aller chercher lui-même.
|
En poursuivant la battue, Mr. Jolibois (car hélas la passion
aveugle) arrive sur la grande route juste au moment où
le Docteur y cheminait paisiblement.
|

Le Docteur ayant reconnu son Psychiote en
personne, descend précipitamment de cheval
pour le prendre et le mettre en croupe.
|
Mr. Jolibois ayant reconnu son Docteur (car
hélas la passion aveugle) rebrousse
précipitamment pour lui échapper.
|
Et se voyant poursuivi, il résiste.
|

Et voyant que la servante s'en mêle, il détale.
|
La lutte s'engage.
|
Et la victoire se déclare.
|

Après quoi le Docteur prend en croupe son Psychiote et continue
son voyage.
|
Arrivé à la frontière, le Docteur est mis en quarantaine
et on lui prend ses effets pour les fumiger.
|
Sa servante traite fort mal l'inspecteur
sanitaire qui lui ordonnait
de purger sa quarantaine, et elle lui
réplique: Purge-toi toi-même, vieux démon!
|

Cependant Mr. Pencil et Mde. Jolibois arrivant au même
lieu, la même invitation leur est faite. Mr. Pencil
répond qu'il s'est purgé en route; et Mde. Jolibois
qu'elle ne se purge jamais. Ce qui fait rire l'officier
sanitaire, homme de beaucoup d'esprit.
|
Les effets du Docteur sont fumigés. Mr. Jolibois (car
hélas la passion aveugle) y voit la continuation
du complot tramé par sa femme et les deux vils
séducteurs, et il suffoque de jalousie.
|
Les ais de la caisse ayant cédé, les deux
valets de santé n'ont que le temps de
crier: au Choléra!... au Choléra!!!
|

A la vue du Choléra en personnes les officiers de
santé prennent le mors aux dents.
|
Et les infirmiers aussi.
|
Et les infirmières pareillement.
|
Heureusement la servante s'aperçoit
que c'est le Psychiote de son maître
qui s'est échappé, et elle l'a bientôt
repris.
|

Accourue au bruit Mde.
Jolibois reconnaît
que c'est son époux
que est enlevé par
une femme.
|
Et à son tour (car hélas la passion aveugle)
elle ôte son chapeau pour
s'abandonner aux amertumes de
sa situation d'épouse.
|
Et aux larmes de sa position de mère.
|
Et aux rages de sa nature de femme.
|

Après quoi, dans un entretien intime,
elle charge Mr. Pencil de lui rendre son
époux et le bonheur inclusivement.
|
Cependant le Psychiote replacé dans un cabinet vitré, brise
les vitres, et se montre de plus en plus indomptable et effréné.
|

Le Docteur commence à être fatigué de son Psychiote,
et la servante est d'avis qu'il faut s'en défaire.
|
Sur ces entrefaites, Mr. Pencil introduit Mde. Jolibois, et il expose qu'elle
vient réclamer un époux. Le Docteur approuve fort, et la servante ajoute qu'on
le trouvera dans le cabinet vitré.
|

Première entrevue.
|
Après quoi Mr. Pencil prend la parole, et émet, à distance,
des propos adoucissants.
|

Après quoi il raconte les violences
de l'ouragan, les ténèbres de la
meule, les démangeaisons de la
forêt, et il montre partout Mde.
Jolibois pure et respectée.
|
Après quoi, il s'apitoie
sur l'aveugle cruauté
des qui pro quo.
|
Le Docteur étant survenu, raconte à son tour l'écrasement
des salades, les tourbillons de la volières, et le séjour dans
le cabinet des crocodiles, en sorte que les faits s'expliquent
et que la lumière jaillit par torrents.
|
Mr. Jolibois renaît à la conviction d'une
épouse pure et respectée.
|

Etant tout à fait rené, Mr Jolibois (car hélas la passion ne l'aveugle plus)
demande qu'on ouvre le cabinet vitré, et il se jette dans les bras de son
épouse pure et respectée. Mr. Pencil embrasse la servante, et le Docteur
s'embrasse lui-même.
|
Une voiture ayant été louée en commun, l'on reprend ensemble la
route du pays, et l'on recueille en passant le bourgeois et son chien
qui étaient restés sur le Télégraphe.
|

Aussitôt tous les Télégraphes de toutes les lignes télégraphiques
reprennent leur état normal, le choléra cesse, et les affaires
de l'Europe se tranquillisent.
Page 72ème et dernière.
Autographié à Genève par l'auteur.--Lith. de Schmid.

Seules autographies du même auteur
dont les éditions originales ne se trouvent que: à Paris,
chez Abm. Cherbuliez, rue de Tournon, 17
et à Genève, chez Ledouble, Wessel et Cherbuliez:
Monsieur Jabot,
monsieur Vieuxbois,
monsieur Crépin,
monsieur Pencil,
Le Docteur Festus.